Au stade où vous en êtes, vous devez à présent avoir compris quel fiscalité et quel régime sociale s’appliquent à votre entreprise. Cela a dû vous permettre d’avancer dans la définition juridique, fiscale et sociale de votre entreprise. Toutefois, tout n’est pas terminé… Maintenant que vous maîtrisez ces “fondamentaux”, il vous faut choisir le meilleur statut
Aujourd’hui, dans beaucoup de situations, tous les éléments (statut juridique, régime social, régime fiscal…) peuvent s’assembler sans trop de contraintes. Mais, pour bien les assembler, vous devez connaître l’impact de chacun des éléments. Voici donc quelques explications qui vont vous aider à choisir le cadre juridique, social et fiscal le plus adapté puisque les trois éléments sont liés.
Sommaire :
- Rappels : les différentes formes juridiques
- Rappels : les différents statuts d'entreprise
- Forme juridique : ces critères qui doivent guider votre choix
- Forme juridique : ces critères qui ne devraient PAS guider votre choix
Le choix que vous ferez doit dépendre, avant tout, de :
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votre projet ;
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vos partenaires ;
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la protection, celle de votre famille, celle de votre entreprise et de vos biens dont vous avez besoin ;
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la protection de vos salariés.
Rappels : les différentes formes juridiques
Il n'existe que deux formes juridiques en France
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EI : Entreprise Individuelle. Elle se caractérise par le fait d’être dirigée, comme son nom l’indique, par une seule personne. Par ailleurs, elle doit être inscrite au registre du commerce des sociétés ou au répertoire des métiers, mais elle n’a pas le caractère de personne morale. Il ne s’agit pas d’une société : il n’y a donc pas de séparation entre le patrimoine de l’entrepreneur et celui de l’entreprise.
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La société. Elle est dirigée par une ou plusieurs personnes. Il y a séparation entre le patrimoine de l’entrepreneur et celui de l’entreprise.
Rappels : les principaux statuts juridiques de l’entreprise
Pour terminer, découvrez ci-dessous les différents statuts juridiques que vous pouvez utiliser pour créer votre boîte :
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Micro-entreprise. Il s'agit d'une entreprise individuelle qui a un régime fiscal particulier pour au sein de laquelle le dirigeant a un régime social particulier. Ce statut a un avantage majeur : les cotisations sociales ne sont payées que si l'entreprise fait du chiffre d'affaires. En revanche, ce statut a un désavantage : les cotisations sociales sont basées sur le chiffre d'affaires, ce statut n'est donc valable pour tous
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EIRL : Entrepreneur Individuel à Responsabilité Limitée. Ce régime est ouvert à tous les entrepreneurs individuels. Son intérêt réside dans la protection du patrimoine individuelle en cas de faillite de l’entreprise. Sont concernés par cette forme juridique les professions libérales, les commerçants, les artisans, et les exploitants agricoles.
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SARL : Société à Responsabilité Limitée. Elle est dirigée par un gérant tenu de rendre des comptes au moins une fois par an à tous ses associés lors d’une assemblée générale. Son intérêt réside dans sa gestion, plus simple que celle d’une société anonyme. Le capital social de départ ne connaît pas de minimum.
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EURL : Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée. Il s’agit d’une SARL limitée à une seule personne. La responsabilité est limitée aux apports. Le capital social est également libre.
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SA : Société Anonyme. Il s’agit d’une société de capitaux. Son grand avantage est de permettre la levée de capital auprès d’investisseurs qui ne supportent des pertes qu’à hauteur de leurs apports. Ce type d’entreprise peut être côté en bourse.
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SAS : Société par Action Simplifiée. Il s’agit d’une société de capitaux. Proche de la Société Anonyme dans sa forme, elle offre cependant plus de liberté aux différents associés. En effet, son fonctionnement découle davantage des statuts fixés par les associés que de la loi. la SAS permet notamment de dissocier le capital du pouvoir de décision.
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SASU : Société par Action Simplifiée Unipersonnelle. Il s’agit d’une SAS avec un seul actionnaire.
Forme juridique : ces critères qui doivent guider votre choix
Forme juridique et projet
Le projet est ce qui doit guider prioritairement le choix de la forme juridique de votre entreprise et de son régime fiscal. Plusieurs points doivent être pris en compte avant le choix définitifs :
L'activité de l'entreprise
D’abord, notez bien que certaines activités doivent s’exercer sous une forme juridique particulière ou avec un régime fiscal particulier. Consulter les obligations des activités réglementées.
Par ailleurs, certaines activités ne sont pas recommandées en entreprise individuelle au régime micro-fiscal (= micro-entreprise, anciennement auto-entrepreneur) ou en sont exclues :
- Les activités de commerce nécessitant des achats car la TVA n'est pas récupérable sur vos achats et vos cotisations sociales sont calculées sur votre chiffre d'affaires, or les achats et dépenses ne sont pas déductibles.
- Les activités qui nécessitent des salariés. Idem, vous aurez des charges (les salaires et cotisations sociales à payer) que vous ne pourrez pas déduire.
- Les activités qui nécessitent un investissement (achat de véhicule, machine...) car la TVA n'est pas récupérable et vous ne pouvez pas amortir vos investissements.
- Les activités agricoles dont le dirigeant est affilié au régime social de la MSA sont exclues du régime
- Les activités immobilières (marchands de biens, agents immobiliers, etc) sont également exclus
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Renseignez-vous plus en détails
La nature de vos futurs clients
Si votre clientèle est constituée d’entreprises, vous devez vous poser les questions suivantes :
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Quelle forme juridique aura la plus forte crédibilité auprès de vos futurs clients (à relativiser en fonction du capital social) ? Cela dépend vraiment de vos clients. Certaines entreprises sont très souples et d'autres moins...
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Quelle forme juridique vous permettra de fournir un extrait-Kbis qui sera probablement demandé par le service comptabilité de vos clients ? L'extrait-Kbis est le document qui prouve l'existance d'une société. Pour les entreprises individuelles (et donc les micro-entrepreneurs), il s'agit d'un extrait-K.
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Quelle forme juridique permettra une cotation de l’entreprise qui est recherchée par les fournisseurs mais aussi par les clients ? Une forme sociétaire !
Si votre clientèle est constituée de particuliers, ces questions ne se posent pas.
Le niveau des investissements et des charges
Si les cotisations sociales / charges sont importantes, privilégiez un régime fiscal qui permet de les déduire avant de payer l'impôt (donc, pas le régime micro-entrepreneur)
En ce qui concerne le besoin de financement des investissement - et en fonction de la nature des financements en question - la société peut être la forme juridique la plus adaptée à votre entreprise.
Les autres éléments à prendre en compte
Selon votre situations, d’autres éléments peuvent être pris en compte :
- Les objectifs et les ambitions du projet :
Vous pouvez travailler seul ou avoir des salariés dans toutes les formes juridiques mais ne choisissez pas le régime micro-entreprise si vous embauchez.
- Avoir des associés ou pas ?
Si vous souhaitez avoir des associés, la société est obligatoire.
- Quel est le marché visé (local, régional, national, international…) ?
Si vous envisagez un développement national voire international, privilégiez la société qui est plus crédible face aux investisseurs et à certains clients
- Y-a-t-il une transmission envisagée aux enfants ?
Privilégiez la société qui est plus avantageuse fiscalement au moment de la cession.
- Y-a-t-il une croissance externe envisagée ?
Privilégiez la société qui est plus adaptée à ce type d'opération.
- L’activité sera-t-elle temporaire ou pérenne ? Complémentaire ou principale ?
Si l'activité est temporaire ou complémentaire à une autre activité, le régime de la micro-entreprise peut être adapté, si l'activité est compatible.
- Le cadre personnel dans lequel le projet sera mis en œuvre Voulez-vous travailler avec votre conjoint(e) ?
Vous pouvez choisir l'entreprise individuelle ou la société. Cf. le statut de conjoint-collaborateur.
Forme juridique et partenaires du projet
Même si vous allez diriger seul l’entreprise, vous aurez des partenaires, voire des associés (qui peuvent être “dormants”). Ils peuvent avoir des exigences ou des habitudes de travail qui vous conduiront à privilégier telle ou telle forme juridique, tel ou tel régime fiscal.
Vous devez donc vous poser la question de l’impact de votre cadre juridique sur :
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vos financeurs ;
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vos fournisseurs ;
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vos associés ;
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vos distributeurs ;
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vos partenaires médias.
…
Forme juridique et protection du dirigeant et de l'entreprise
Le besoin en matière de protection des biens et des personnes dépend de chaque situation.
La protection des biens du dirigeant
Elle peut s’établir de plusieurs façons :
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le contrat de mariage ;
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si vous avez des biens personnels importants : optez pour la société ou l'EIRL ;
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si vous avez des biens fonciers : optez pour la société ou l'entreprise individuelle avec déclaration d’insaisissabilité.
Mais surtout pensez à une gestion quotidienne de l’entreprise, à des outils d’anticipation, à une relation partenariale avec le banquier... Beaucoup des défaillances pourraient être évitées : à la première facture que vous ne pouvez pas honorer, réagissez ! Attention, le contrat de mariage, la société ou l’option pour l’EIRL ne protègent pas le dirigeant en cas de faute de gestion, en cas de caution, ou en cas d’hypothèques.
Les solutions de protection du patrimoine sont à considérer en fonction des biens à protéger et des risques pris par ailleurs (cautions, hypothèques) mais elles ne sont pas une raison pour oublier les règles de bonne gestion d’une entreprise (notamment, de prendre une assurance !). Consultez un notaire, il saura prendre en considération tous les éléments importants.
La protection juridique du dirigeant
Le responsable légal de l’entreprise est responsable des dommages causés à autrui (les tiers et les clients) par lui-même, ses locaux et son matériel professionnel ainsi que par les objets qu’il vend, fabrique, répare ou installe. Pour se protéger, il existe des assurances privées. N'oubliez pas toutefois que vous ne serez pas protégé en cas de faute ou de dol.
Si vous souhaitez, et nous vous le recommandons vivement, une assurance “responsabilité civile”, privilégiez l’entreprise individuelle au régime fiscal du réel ou la société pour déduire le coût de cette assurance dans vos charges (et réduire ainsi votre bénéfice imposable).
Remarque : L’assurance personnelle du dirigeant (habitation ou autre) ne couvre pas les activités professionnelles.
La protection santé du dirigeant et de sa famille
La couverture santé / retraite / prévoyance obligatoire est une couverture minimum. Vous pouvez la compléter.
Si vous souhaitez une assurance santé, prévoyance ou retraite complémentaire et bénéficiez de la loi Madelin pour défiscaliser vos cotisations, privilégiez l’entreprise individuelle au régime fiscal du réel ou la société si vous prenez une assurance “entreprise” (dite assurance sociétaire).
Les solutions de protection santé, prévoyance, retraite (complémentaires au régime obligatoire) sont à considérer en fonction de la situation du créateur : il faut partir des besoins de chaque créateur et de chaque famille de créateur.
L’assurance chômage
Le mandataire social, au RSI ou en salarié, n’est pas couvert par le risque chômage. Si vous souhaitez une assurance, et nous vous le recommandons, privilégiez l’entreprise individuelle au régime fiscal du réel ou la société pour déduire le coût de cette assurance dans vos charges (et réduire ainsi votre bénéfice imposable).
Les solutions de protection chômage du dirigeant ont des avantages et des inconvénients à peser et qui dépendent de la situation de chacun. Il en existe plusieurs, à vous de juger !
La protection des biens de l’entreprise
L’entreprise également possède des biens qu’il convient de protéger. Perte d’exploitation, vols… Si vous souhaitez une assurance, et nous vous le recommandons, privilégiez l’entreprise individuelle au régime fiscal du réel ou la société pour déduire le coût de cette assurance dans vos charges (et réduire ainsi votre bénéfice imposable).
La protection de vos salariés (Santé – Prévoyance – Retraite complémentaire)
Si vous souhaitez / devez offrir à vos salariés une complémentaire ou une prévoyance complémentaire ou un produit retraite, il vous faudra, la plupart du temps, être en société pour déduire ces charges de votre bénéfice imposable.
Bon à savoir: les produits d’assurance peuvent être mis en œuvre dès le lancement de l’entreprise car le montant des contrats étant basé, entre autre, sur le chiffre d’affaires, le coût est donc assez accessible.
Consultez le site de la Fédération Française de l'Assurance pour en savoir plus.
Forme juridique : ces critères qui ne devraient PAS guider votre choix
Les critères doivent être pris en considération mais ne sont pas les critères les plus importants dans votre choix.
Les formalités de création d’entreprise
Les coûts varient de 0€ à 250€ pour les frais de greffe (ou frais du répertoire des métiers pour les artisans) pour l’immatriculation hors les coûts liés à des obligations (stage d’initiation à la gestion pour les artisans, formations pour certaines activités réglementées...).
Consultez les coûts des formalités d'entreprise.
Pour vous immatriculez en ligne en quelques minutes, vous pouvez utiliser le site d'Infogreffe : https://www.infogreffe.fr/acces-formalite/immatriculation.html ou https://www.guichet-entreprises.fr/fr/
La gestion administrative de l’entreprise
Avant ou après l’immatriculation, la gestion administrative de l’entreprise est présente dans la vie de son dirigeant.
Pour la création de l’entreprise, le nombre de « papiers » dépend de la forme juridique choisie, du lieu de domiciliation de l’entreprise, de la nature de l’activité, de situations particulières (ACCRE, créateur étranger…)… Et il faut distinguer les documents obligatoires (RSI, INSEE, Impôts…) de ceux qui ne le sont pas (sollicitations d’assurances diverses et d’annuaires, etc …).
Sachez que, désormais, la plupart des déclarations fiscales et sociales se font en ligne : cela simplifie grandement la gestion administrative de l’entreprise.
L’impact financier pour l’entreprise
Le choix de la forme juridique fait varier l’impact financier pour l’entreprise. Toutefois, vous devez adopter un raisonnement global et ne pas adopter une réflexion de court terme. Trois exemples pour illustrer ce point :
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Dans le cas du régime micro-entreprise, vous devez prendre en compte l’impact d’un changement de régime dans les années suivantes… et l’impact que cela aura sur les clients (TVA, hausse des charges et donc du prix de vente).
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En entreprise individuelle, vous ne pouvez pas déduire de vos impôts 18% du montant que vous apportez au capital puisqu’il n’y a pas de capital social.
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En entreprise individuelle, vous ne pouvez pas déduire de vos impôts personnels une partie de vos éventuels intérêts d’emprunt contracté pour créer l’entreprise, mais vous pourrez les déduire des charges de l’entreprise
Comme vous le voyez, le sujet de la forme juridique ou du régime fiscal ne peut se discuter avec un professionnel qu'une fois votre projet bien avancé.
Mise à jour : 24 juillet 2021